19 juin: 
On se remet en route sous un ciel un peu mitigé via le canal Pitt pour rejoindre le Paso Gavilan. Le paysage est vraiment grandiose ici. Les montagnes gigantesques sont perchées au dessus de l’eau et tellement touffues de végétation dense qu’on pourrait se croire en pleine forêt tropicale. Mais les sommets recouvert d’un manteau blanc nous rappelle vite que ce n’est
pas le cas. Le Paso Gavilán est étroit et jonché de petits îlots. Il n’est pas cartographié alors on ouvre l’œil mais franchement aucun danger ni de haut fond ne sont en vue. C’est clean!! 

Nous nous arrêtons dans une minuscule baie qui n’a pas de nom sur nos cartes. Elle est située au nord-est de l’île Nuestra Senora de la Esperanza. Elle a presque la taille de notre bateau. Comme elle n’est pas loin de la Punta Diaz on la surnomme caleta Diaz. 
On se sent comme dans un cocon, bien protégés par tous les côtés! Le coup de vent peut souffler, on sentira à peine un mouvement! 

21 juin: 
C’est notre journée la plus courte de l’année alors on en profite à fond ! On se motive pour escalader au sommet de notre montagne qui nous surplombe. Mais la première partie de la randonnée est bien galère. Il n’y a aucun sentier. Mais un mur végétal dense, très dense! On se faufile dessous, dessus, à travers une jungle de feuillus, d’arbustes, de fougères. C’est méga humide et très mou. Il y a tellement de mousse que des fois on se demande ce qu’il y a en dessous. Et puis tout compte fait on avance petit à petit. On se retrouve au sommet essoufflés, trempés mais heureux ! On a réussi. Enfin que la première partie. 
On profite de la vue dégagée, on parcoure tout le caillou sans arbres ni arbuste, on admire les condors qui volent au-dessus de nos têtes, on fait des photos sous tous les angles et puis on évalue la deuxième partie de l’escalade et là on se dit qu’on a assez galéré pour aujourd’hui. On va rentrer au bateau et déguster une bonne fondue au fromage pour fêter le solstice
d’hiver ! 

23 juin: 
Nous avons profité d’une journée plutôt sèche pour marcher jusqu’au au sommet de l’île située de l’autre côté du Paso Gavilán et où il y a moins de végétation à franchir. Avec notre nouveau dingy et notre nouveau hors bord de 15 CV on peut partir en trip!! On peut aller loin et visiter les alentours à fond la gomme!! Avant on n’aurait jamais envisagé une telle escapade. 

De retour après une belle marche de 760m de dénivelé avec vue sur tous les fjords environnants, Robin est reparti directement à la pêche et il a failli avoir un fish elbow tellement que ça mordait bien. Demain on va manger du rock fish! Ça faisait longtemps! 

24 juin :
Ça sent l’hiver .. 

Après 5 jours à poireauter dans notre bassin, nous détachons nos cinq haussières et nous tentons une échappée avant la grosse dépression qui vient du large et nous fonce droit dessus. À peine sortis de notre abri, nous avançons péniblement au moteur. Pourtant le canal Tres Cerros est plat comme un billard et le vent souffle à peine. On doit avoir un paquet d’algues dans l’hélice. On entame alors plusieurs fois marche avant et marche arrière avec safran et dérive relevés en espérant se libérer du kelp qui doit être bien entortillé. Ça y est c’est parti ! Notre vitesse a repris une allure normale. 

Quelques mille plus loin, arrivés dans le canal Wide, une tempête de neige nous tombe dessus puis le nuage passé, le vent vire à 180 degrés et nous pousse de plein fouet par l’arrière. On patiente jusqu’à ce que l’accalmie se présente pour dérouler le génois et poursuivre notre route au nord sous voile. 

Il est 17:30 quand nous rejoignons la caleta Greenpeace dans le Fiordo Ringdove juste avant que le soleil ne se couche. On se faufile dans un archipel d’îlots pour piocher notre ancre dans cette caleta Greenpeace guidés par deux dauphins australs. On amarre 3 haussières à terre et puis on se douche!! Ah une bonne douche chaude, ça faisait longtemps !! 
Et puis voilà que le chauffage s’arrête! Mais nan??!!  J’ai mes cheveux à sécher et le pain à faire lever .. il fait 4 degrés dehors.. tout va bien se passer, j’ai un Mc Giver à bord! ?

27 juin: 
Enfin du soleil!! Ça faisait un bail! 
Il devient urgent de sécher la cabine arrière dans laquelle on a coupé le chauffage depuis notre départ de Puerto Williams pour entreposer les légumes, le congélateur et notre matériel de ski et Kitesurf. Je crois qu’elle n’aime pas trop son nouveau rôle de garage et garde- manger depuis un mois. Elle nous le fait savoir par sa transpiration excessive! Et ça suinte là-dedans, ça moisit carrément! 

Heureusement notre navigation sur le canal Messier est paisible et nous permet de tout sortir sur le pont pour un séchage intensif pendant que les ventilateurs tournent à fond dans la cabine! 

Puerto Eden est en vue. Nous arrivons sur le coup de 14h en même temps que l’Esperanza et le Cruz Australie deux ferrys ravitailleurs du coin. Il y a du trafic dis donc. Ça se bouscule sur l’eau! Nous voilà revenus à la civilisation! 
On s’ancre à côté de la déchèterie et sautons dans notre bolide de dinghy pour rejoindre le joli village de Puerto Eden. 

Puerto Eden marque la moitié de notre périple dans les canaux de Patagonie. Mais c’est aussi un lieu de rencontres que nous avons faites il y a une année et demie lors de notre premier passage. 
Alors on s’empresse de retrouver les copains! Aller saluer cette minuscule communauté avec qui nous avons sympathisé pendant deux semaines en attendant de recevoir des pièces de rechange pour notre moteur. 

On retrouve Isa et Javier, fidèles à leur poste de la petite supérette. Andres le roi de la pizza et des Empanadas, Lalo le responsable du générateur du village et sa femme (la sœur de Gabriela Paterito icône de la descendance Kawesqar) qui nous invitent à boire le café en attendant que notre commande de pain sorte du four. 

Malheureusement il y a eu des départs comme Mathias l’infirmier qui est parti s’installer à Porvenir et des dégâts: l’hospedage de Don Carlos qui est partie en fumée l’été passé.  Keri et Greg manquent aussi à l’appel mais on les retrouvera vers Puerto Montt au mois d’août pour un trip de ski sur les volcans.. 

Il y a du nouveau côté sentier que nous inaugurons d’ailleurs pour retourner à notre dinghy. Ils terminent la construction d’une nouvelle passerelle en bois qui serpente autour du village de Puerto Eden et sur ses hauteurs avec de jolis points de vue. 

28 juin: 
Réveil très matinal (6:30) ce matin pour être à l’heure dans le passage de l’Angostura Inglesia.
Le ciel est rempli d’étoiles mais la température est à 2 degrés, ça pique ce matin! 
Heureusement on peut piloter le bateau depuis l’intérieur!! Enfin presque.. 

Un ciel sans nuage, on avait presque oublié que ça pouvait exister. On profite, on savoure chaque rayon du soleil qui nous réchauffe et sèche la lessive. Le golfe de Penas est juste là, à la fin du canal Messier .. mais on se le garde pour plus tard. Demain, nous prenons la prochaine à droite, dans le canal Baker, pour aller visiter Tortel. 

29 juin:

Pour nous réchauffer le corps et l’esprit et nous motiver à affronter le canal Baker je nous cuisine des Muffins double chocolate chips!! 

Ça passe ou ça casse.. non ici c’est plutôt ça souffle et tu souffres! 
15noeuds de vent et 1 noeuds de courant dans la figure .. Metani avance difficilement. La tactique : choisir le bon côté de canal Baker pour au moins avoir du courant portant!!  On peut pas trop se plaindre car il fait grand beau! Et le côté droit semble payer!! On progresse mais lentement !

1er juillet: 
Caleta Tortel, c’est mignon, c’est pittoresque, c’est unique! Ce village est niché au cœur de la majestueuse Patagonie, à l’embouchure du fleuve Baker, le plus grand fleuve du Chili, et entouré d’imposantes montagnes et de fjords. 

Tortel nous charme par son authenticité et son architecture unique, faite de passerelles en bois qui serpentent entre les maisons et les quais, créant un paysage digne d’un conte de fée. C’est un des seuls villages du Chili à ne pas avoir de rues pavées! 

Heureusement que nous n’avons pas besoin de refaire le plein total de nos réservoirs de diesel car l’acheminement des jerricanes s’avère musclé et fatiguant! Seulement une centaine de marches nous sépare de la station d’essence! 
On se contentera de remplir juste 2 petits bidons pour assurer le coup. 

Après notre visite à l’Armada, nous partons à la découverte des alentours. Ça fait du bien de marcher au sec, sans batailler avec les buissons et sans le moindre souffle d’air. Par endroits, le sol est encore bien givré et gelé on se cramponne alors à la rambarde. On fait connaissance avec les animaux du village, un chien nous accompagne pendant notre randonnée et un chat saute sur les épaules de Robin, du jamais vu!  Les habitants sont eux un peu discrets, on n’en croise pour l’instant aucun.

5 juillet: 
Vous est-il déjà arrivé de dormir la tête dans une machine à faire de la glace pilée ou du même genre? Nous oui, on l’a vécu et pas juste 5 min. non, une nuit entière! Une expérience fracassante et assourdissante. Ma surdité depuis ne s’est pas arrangée!
Je vous explique: nous sommes ancrés dans l’embouchure du Rio Huemul au fond du fjord Steffen. Il nous a fallu pas mal de temps et d’aller retour devant l’embouchure du fleuve pour trouver un spot convenable pour piocher notre ancre. Car les profondeurs variaient de 50 m à 1 m ! Un vrai mur subaquatique ! 
Du coup, le seul endroit convenable était de mouiller notre ancre au milieu du canal où le fjord se rétrécit et où une profondeur de 15 m était stable sur un rayon de 100 m environ. Mais cet endroit était recouvert d’une fine couche de glace qui craquait bien et se dissipait à notre passage. Donc pas dangereuse en soit pour le bateau ni pour nous ! Enfin.. 
A la fin de la journée toute la glace avait disparu ! On s’est souhaité une bonne nuit et puis la coquine est revenue pendant la nuit! Avec les températures négatives de l’air et de l’eau elle s’est même intensifiée !! 

Mais heureusement on a eu 4 heures de répit le temps que la marée s’inverse! On a pu dormir un chouïa pour être en forme et tenter notre expédition rocambolesque pour rejoindre le glacier Steffen sous la plus belle journée de la semaine!! 

À 10:30 sur le pont givré, le temps ne nous fait pas rêver! On voit que dalle. 
Après 30 minutes de dinghy à casser de la glace et se diriger au gps à travers un brouillard à couper au couteau, on remonte tranquillement le fleuve Huemul. On talonne par deux fois le fond alors on avance tout doux. En chemin, le brouillard se dissipe laissant apparaître un magnifique ciel bleu et un beau soleil accompagné d’une faible brise glaciale. Le prochain virage lui se montre moins sympathique. Il y a un sacré courant qui forme des rapides coriaces. Avec l’eau à – 2 degrés on a pas trop envie de jouer à faire du rafting et à se retourner. Et puis on dirait qu’il n’y a pas assez de fond mais difficile à dire car l’eau est si trouble qu’on ne voit rien, on se les gèle… dommage car le point de départ de la randonnée est juste là de l’autre côté de la berge!!! On vérifie quand même en marchant sur le banc de sable pour nous réchauffer et jeter des cailloux pour estimer la profondeur du bassin mais la conclusion est la suivante: Il n’y a pas assez d’eau dans la rivière pour notre dinghy et trop d’eau pour le traverser avec nos super bottes Xtratuf! 
Alors à notre grand désarroi, on décide de rentrer au bateau! Et de mettre le cap vers de nouveaux horizons plus chauds !

L’hiver n’est pas la meilleure saison pour approcher les glaciers en mode voilier/dinghy. En se rapprochant du golfe de Penas la mer indique 9 degrés ça devrait nous faire du bien!! Et puis y en a marre du froid!

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